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Zaha Hadid : La Reine de la Courbe

"Il y a 360 degrés, alors pourquoi s'en tenir à un seul ?"


Zaha Hadid : La Reine de la Courbe


Zaha Hadid n’était pas qu’une architecte. Elle était une révolutionnaire. Elle a su transformer ses idées en chefs-d'œuvre, fusionnant l’art et la science pour donner naissance à des bâtiments défiant l’imaginaire. Mais derrière chaque chef-d’œuvre se cache un voyage – un parcours semé d’obstacles, de doutes, et de triomphes.


 

Une enfance nourrie par l’art et l’éducation

 

Zaha Hadid : La Reine de la Courbe
Exemple de maison Bauhaus (style très prisé de nos jours)

Née en 1950 à Bagdad, Zaha Hadid a grandi dans un environnement qui stimulait à la fois sa créativité et sa curiosité intellectuelle. Elle a été élevée dans une maison inspirée par le style Bauhaus, un exemple notable de modernisme architectural qui a façonné sa perception précoce de l’espace et de la structure. 


Son père, Muhammed Hadid, homme politique influent et entrepreneur prospère dans l’industrie textile, a cofondé le mouvement socialiste Al-Ahli avant de devenir ministre des Finances après le coup d'État de 1958. Sa mère, Wajiha Al-Sabunji, était une artiste accomplie, apportant une sensibilité esthétique au foyer familial. Ces influences, mêlant politique, culture et art, ont profondément marqué les aspirations de Zaha. 


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Dès son plus jeune âge, elle a montré un intérêt vif pour les mosaïques islamiques, les paysages ondulés de la Mésopotamie et les structures architecturales complexes, des inspirations qui allaient nourrir son style futur.

 

Les mathématiques, selon elle, n’étaient pas une simple discipline académique : c’était une manière d’exprimer les mouvements, les formes et les structures du monde qui l’entourait. Elle disait souvent : « Les mathématiques, pour moi, c’était comme dessiner ». 



Ce besoin de traduire le monde par des équations l’a naturellement conduite à l’architecture, un terrain de jeu où les concepts mathématiques se transforment en formes physiques.

 

Des études marquées par une vision unique


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Après avoir étudié les mathématiques à l’Université américaine de Beyrouth, où elle a exploré les liens entre les chiffres et la beauté des formes naturelles, Zaha Hadid s’installe à Londres pour poursuivre des études d’architecture à la prestigieuse Architectural Association School of Architecture. 


Là, elle ne suit pas les règles établies, mais redéfinit les limites de ce qu’un architecte pouvait créer. Pendant ses années d’études, elle s’impose comme une jeune femme brillante et radicale, loin des conventions du moment.

Elia Zeghelis, professeur à l’Architectural Association, la considérait comme l’une des meilleurs élèves auxquels il a enseigné au cours de sa carrière , il l’a surnommée “l'inventrice du 89 degrés”.

 

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Elle est notamment influencée par des penseurs comme Rem Koolhaas et Bernard Tschumi, malgré ces inspirations, elle conserve sa vision unique et singulière : elle ne rêve pas d’aligner des bâtiments droits et carrés. Elle voit dans chaque espace une possibilité infinie, une courbe qui peut naître, se tordre ou se déployer.


Ses premiers projets académiques ne sont pas des bâtiments traditionnels, mais des idées qui s’affranchissent des contraintes géométriques classiques. Dans ses dessins, les courbes semblent vivre, se mouvoir, défiant toute forme statique et rigide. Mais à l’époque, ses créations sont souvent rejetées, jugées trop avant-gardistes. Cela ne la décourage pas : au contraire, cela renforce sa détermination à aller toujours plus loin.


La persévérance : De “l’architecte sur papier” à “la reine des courbes”


Pendant de longues années, Zaha Hadid a été surnommée “l’architecte sur papier”, un titre qui reflétait autant l’admiration pour son génie créatif que le scepticisme face à la faisabilité de ses projets. Ses designs, souvent spectaculaires, repoussent les limites du possible. Cependant, cette audace n'était pas sans conséquence : bon nombre de ses concepts demeurent, aujourd’hui encore, des esquisses inachevées.

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On pense, par exemple, au projet qu’elle avait imaginé pour le Kurfürstendamm à Berlin en 1986, ou encore, à son visionnaire Peak Leisure Club à Hong Kong en 1983, qui, malgré l’engouement qu’ils ont suscité, sont restés au stade de simples maquettes.

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Pourtant, si ces années de refus auraient pu en décourager plus d’un, Dame Zaha y a vu une occasion de se perfectionner et d’affiner son approche. Elle refusait de laisser les critiques définir son avenir. Et, c’est armée d'une patience de fer, qu’elle s’est mise à étudier les technologies émergentes, comme la conception paramétrique, pour démontrer que ce qui semblait irréalisable pouvait, avec les bons outils, devenir réalité.   

                                                                                                                                            

En 1993, à 43 ans, sa patience porte enfin ses fruits : elle réalise le projet de la caserne de pompiers de Vitra en Allemagne, son tout premier bâtiment construit. Ce bâtiment avant-gardiste incarne le style déconstructiviste de Zaha, symbolisant sa volonté de bousculer les codes et de redéfinir notre vision de l’architecture.


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Le succès de ce projet lui a permis de franchir un cap, prouvant que son architecture, auparavant cantonnée au papier, pouvait être traduite en structures tangibles et fonctionnelles.

 

Une carrière marquée par des réalisations spectaculaires et l’innovation scientifique


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Au fil de sa carrière, Zaha Hadid ne cesse de repousser les limites de l'architecture. Elle savait parfaitement marier originalité et maîtrise technique, un talent qui lui a permis de se distinguer dans son domaine.


En 1982, elle remporte la Médaille d’Or « Architectural Design » pour son concept innovant de rénovation d’une maison de ville à Eaton Place à Londres. Ce projet, bien que resté à l’état de plan, repose sur des calculs minutieux qui permettent de repenser l’espace et l’organisation des volumes tout en respectant l’harmonie des formes. 

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Cette approche scientifique de l’espace et des formes géométriques est restée au cœur de son travail tout au long de sa carrière.

Elle applique des techniques innovantes de modélisation intégrant des principes mathématiques avancés pour concevoir des formes fluides et organiques. Ses premières réalisations mettent en évidence le rôle central des connaissances scientifiques dans son travail : l'architecture dépasse l'esthétique et répond à des exigences techniques strictes.


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En 1988, l’exposition “Deconstructivist Architecture” au Musée d’Arts Modernes de New York marque un tournant dans sa carrière. Cet événement met en avant la démarche innovante de Zaha Hadid, dont les projets s'appuient sur des algorithmes et des calculs géométriques complexes pour concevoir des structures défiant les conventions architecturales. 


À la différence d’autres architectes attachés à la géométrie classique, Zaha Hadid exploite des outils numériques avancés, notamment des modèles paramétriques, pour concevoir des structures qui abandonnent les angles et lignes droites au profit de courbes fluides, dynamiques et organiques.



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Son approche architecturale s’appuie sur une maîtrise des outils numériques, comme les logiciels de conception assistée par ordinateur (CAO), pour repousser les limites de ce qui est réalisable. 


C'est grâce à sa maîtrise de la technologie qu'elle parvient à réaliser ses projets les plus ambitieux, comme Aliyev Centre à Bakou, en Azerbaïdjan, où les courbes fluides n'auraient pu voir le jour sans la modélisation numérique avancée."

 

Les mathématiques paramétriques sont au cœur de son processus, lui offrant la liberté de manipuler formes et volumes de manière précise. Chaque projet est une exploration de nouvelles possibilités, transformant des idées abstraites en réalisations concrètes qui réinventent les normes architecturales.

 

La Science derrière l’Architecture


Derrière chaque courbe improbable de Dame Zaha se cachent des principes mathématiques et scientifiques de haute précision. Mais comment ces concepts abstraits prennent-ils forme dans l’architecture ? À travers deux exemples marquants, plongeons dans l’alliance entre science et création. Du calcul minutieux qui structure l’Aquatic Centre de Londres à l'inspiration biomimétique des os humains dans la caserne de Vitra, chaque bâtiment témoigne de l’incroyable pouvoir de la science pour transformer l’espace et repousser les limites de l’architecture.


Les mathématiques : un outil pour réinventer l’architecture


Le travail de Zaha Hadid montre comment les mathématiques et la science peuvent être des catalyseurs de créativité. Plutôt que de se contenter de suivre des règles rigides, elle les réinvente pour imaginer des formes géométriques impossibles. En exploitant des outils numériques avancés, elle utilise des calculs algébriques et des systèmes dynamiques pour créer des bâtiments qui semblent défier la gravité.


Un exemple marquant de l’approche scientifique de Zaha Hadid est le Centre aquatique de Londres, conçu pour les Jeux olympiques de 2012. Inspiré par le mouvement des vagues, son toit ondulant repose sur une surface hyperboloïde. Cette structure élégante et fonctionnelle, soutenue par seulement trois points d'appui, résulte de simulations paramétriques avancées, optimisant à la fois la répartition des forces et la légèreté de la construction.


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Par exemple, la répartition des forces de compression et de tension dans la structure a été optimisée en résolvant des systèmes linéaires et en intégrant les moments de flexion. La forme globale, décrite par une fonction tel que z (xy) = a sin⁡ (bx) + c cos ⁡(dy), a été ajustée pour garantir stabilité et beauté.



Le Centre aquatique de Londres prouve que la beauté architecturale peut émerger d’une rigueur mathématique. Zaha Hadid a transformé des calculs abstraits en un chef-d’œuvre tangible, où chaque courbe est à la fois fonctionnelle et poétique.


 

Le biomimétisme : Quand la Nature inspire l’Architecture


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Le biomimétisme, un concept central dans l’approche architecturale de Zaha Hadid, s’appuie sur l’observation des formes et des principes naturels pour résoudre des défis humains. Cette méthode, combinée à une rigueur mathématique, reflète son engagement à intégrer science et esthétique. Par exemple, la structure interne des os humains, avec leurs trabécules légères mais robustes, a inspiré la conception des murs inclinés de la caserne de pompiers de Vitra. Ces murs ne sont pas seulement esthétiques : ils redistribuent intelligemment les forces, garantissant stabilité et durabilité.






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Prenons l’exemple des os humains : ils possèdent une structure interne exceptionnelle qui leur permet d’être à la fois solides et légers. À l’intérieur, ils contiennent des trabécules, de minuscules filaments qui forment un treillis. Ce dernier est organisé pour absorber les forces et répartir les contraintes, ce qui les rend incroyablement efficaces : ils peuvent supporter de lourdes charges sans être massivement lourds. 


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La Caserne de pompiers de Vitra, conçue par Zaha Hadid, applique ce même principe. Les murs inclinés et les formes angulaires du bâtiment ne sont pas des choix arbitraires : ils sont minutieusement conçus pour guider et redistribuer les forces, à l’image des trabécules dans un os.



 

Zaha Hadid : La Reine de la Courbe

Lorsqu’un camion de pompiers s’élance ou que des équipements lourds sont déplacés, le bâtiment ne subit jamais de contraintes excessives en un point précis. Au contraire, ses surfaces inclinées redirigent intelligemment les forces, garantissant une stabilité exceptionnelle tout en optimisant l’utilisation des matériaux. Grâce à cette ingénierie inspirée de la nature, la station allie solidité, élégance et durabilité, prouvant que chaque angle, chaque ligne, contribue à une efficacité remarquable.


Une reconnaissance mondiale et des distinctions prestigieuses


Le génie scientifique et créatif de Zaha Hadid ne tarde pas à être reconnu à l’échelle internationale. En 2004, elle devient la première femme à recevoir le prix Pritzker, considéré comme le plus grand honneur et l’équivalent du Prix Nobel dans le monde de l’architecture.


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Cette reconnaissance souligne non seulement son approche révolutionnaire, mais aussi la profondeur scientifique qui sous-tend son travail. Ses algorithmes paramétriques et son utilisation de logiciels de modélisation avancée sont désormais considérés comme des outils essentiels dans le monde de l’architecture moderne.


Zaha Hadid : La Reine de la Courbe

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Les distinctions s’enchaînent : Commandeur de l’Ordre des Arts et des Lettres en France, Dame Commandeur de l’Empire Britannique, le Praemium Imperiale japonais (prix créé en hommage au Prince Takamatsu) et la médaille d’or royale du Royal Institute of British Architects viennent saluer l’impact de son travail. 

 

Chaque prix souligne son apport à l’architecture, mais aussi à la manière dont les sciences, en particulier les mathématiques, peuvent redéfinir la manière dont nous construisons notre environnement.


Bâtir un futur où l'éducation et la créativité transcendent les limites

 

Zaha Hadid voyait l’architecture comme un langage universel, capable de raconter des histoires, d’éveiller des esprits, et surtout, de repousser les frontières du possible. Mais son ambition ne se limitait pas à ses créations de verre et d’acier. Elle avait un autre rêve : transmettre aux jeunes filles une passion pour les sciences et les mathématiques, des domaines où elles sont souvent sous-représentées.

Pour Zaha, les mathématiques étaient une forme de poésie. En entrant dans la Mathematics: The Winton Gallery au Science Museum de Londres, cette vision prend vie. 


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Au centre, un avion de 1929 flotte, comme porté par un tourbillon de courbes lumineuses. Ces formes élégantes ne sont pas que de l’art : elles incarnent les équations de l’aérodynamique, ces flux invisibles qui rendent le vol possible. Ici, les mathématiques deviennent tangibles, presque magiques.




Zaha voulait montrer que les sciences ne sont pas froides ou abstraites, mais vibrantes et profondes, capables de raconter des histoires sur la nature et le progrès humain. « Les mathématiques sont la trame du monde », disait-elle, « et leur beauté se révèle› lorsqu’elles prennent vie. »


Hadid n’était pas seulement une architecte visionnaire, elle était aussi une éducatrice passionnée. À 30 ans, elle devient maître-assistante à l’Architectural Association School, un poste qu’elle décrocha grâce à ses peintures futuristes. Elle savait que l’éducation pouvait transformer non seulement des compétences, mais aussi des vies. Elle admirait ses étudiantes, souvent parmi les plus talentueuses, mais qui doutaient trop souvent d’elles-mêmes. Pour elle, apprendre les sciences devait être une aventure créative, une invitation à explorer et à imaginer des mondes nouveaux.


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À travers ses œuvres, de la galerie des mathématiques à ses bâtiments futuristes, elle pose une question essentielle : et si tout était possible ? Ses formes fluides et ses espaces ouverts sont autant de métaphores pour briser les murs invisibles : ceux du doute, des échecs redoutés, ou des normes qui freinent les ambitions.

 

Un héritage inoubliable 


Le 31 mars 2016, Dame Zaha nous quittait à 66 ans. Mais son héritage va bien au-delà des murs qu’elle a construits ou des théories qu’elle a enseignées. Elle a redéfini les mathématiques, non pas comme un savoir réservé à une élite, mais comme un outil universel, à la portée de ceux qui osent chercher, rêver et inventer.

Pionnière et engagée, elle a particulièrement marqué une génération de femmes architectes, les encourageant à dépasser les barrières imposées par la société. Pour elles, son message était clair : « Vous avez déjà des ailes. Lancez-vous, car vous pouvez aller bien plus loin que vous ne l’imaginez. »

 


Écrit par Nawel et édité par Intan



Sources :


 

 

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